Chapitre 8

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Ophélia nagea dans un océan de ténèbres. Sous elle, des images, des souvenirs.

Dans les tours d’un sanctuaire malkouthien, des millions d’azohim circulaient librement. Aucun gardien ne les accompagnait. Elles discutaient, riaient, échangeaient avec le tout venant, se révélant aux yeux de tous. Certaines portaient des armures, des armes, et circulaient en petits contingents, comme le faisaient habituellement les puissances. Elles maintenaient l’ordre, fermement, face à la frénésie de la foule. D’autres portaient d’élégantes chasubles noires et accordaient des bénédictions à ceux qui leur demandaient, comme le faisaient les séraphins. La lumière environnante passait dans leurs halos cristallins, illuminant le monde. Sur les scènes des théâtres et des salles de concerts, elles jouaient, chantaient, dansaient, comme des principautés. Elles affichaient sans complexes leur beauté, leur sensualité.

En nageant dans les souvenirs, Ophélia découvrit des espaces inédits du sanctuaire. Elle découvrit des cathédrales de cristal noir, immenses caverneuses. Une odeur de miel et de fleur parfumait l’air. Le sol était fait de terre battue, et parcourut de ruisseaux. Un paysage bien différent des tempêtes de feu des cathédrales des élohim. L’atmosphère ici était particulièrement accueillante, si bien qu’Ophélia resta longtemps dans cette vision. De grandes bannières bleues et rouges drapaient les allées. Là, les azohim prêtresses faisaient office, priant la part passive du Créateur : AZ. 

“AZ, Mère de la Création

Prends-nous dans ton étreinte, baigne-nous de ton Reflet

Car quand EL éclaire, c’est toi qui donnes forme,

Toi, cristal silencieux, amplifies son éclat.

Enveloppes la vie de terre et d’eau

Permets aux âmes de trouver refuge dans ton sein”

Sur une fresque, Ophélia observa une scène mythique : celle du Porteur de Lumière créant la première azoha, Kokab. Lors de la Première Brisure, les séphiroth, vases de cristal protégeant les royaumes des cieux, s’étaient brisés. À partir de leurs éclats, le Porteur de Lumière avait forgé les azohim, infusant sa lumière en elles pour leur donner vie. Grâce à Kokab, et à toutes les azohim qu’el avait forgé, le Porteur de Lumière et ses frères primordieux avaient pu se reproduire, et donner naissance aux élohim. 

Ophélia observa Kokab, qu’elle ne reconnut qu’à son nom, inscrit sur la fresque. L’azoha avait de longs cheveux roux, des iris de saphir. Elle avait été l’âme sœur du Porteur de Lumière, sa favorite, mère de Sandalphon souveraine consort de Hod. Sur la fresque, son bien-aimé l’enlaçait tendrement alors qu’el émergeait du brasier primordial. Et pourtant, malgré tout cet amour, el l’avait trahi. Et aujourd’hui, plus rien ne restait de Kokab. 

Presque plus rien. 

Ophélia émergea doucement de l’océan et revint à la réalité du présent. Allongée dans son lit, elle tenait dans sa paume le cristal trouvé par Michaël sur Sicad. Le petit objet n’avait pas été la source des révélations que Burrhus lui avait faites, mais il les corroborait. Il contenait une myriade de souvenirs, de données, cachés dans sa matière cristalline. Et tout d’un coup, après sa rencontre avec Burrhus, Ophélia était capable de les lire. 

Lorsque le séraphin lui avait transmis la vérité sur la Seconde Brisure, Ophélia avait douté. Les données qu’el lui avait transmis auraient pu être fausses, fabriquées de toutes pièces.  Mais alors qu’elle recevait ces données, de nouveaux espaces s’étaient créés dans l’esprit de l’azoha. De nouvelles capacités, étranges mais instinctives, s’étaient débloqués en elle. Des logiciels dormants, des profondeurs de son système, s’étaient éveillés. Et lorsqu’elle était rentrée au gynécée, Ophélia avait touché le cristal de Michaël, attirée par lui. Elle avait ainsi découvert ces preuves supplémentaires que Burrhus avait dit vrai. La Seconde Brisure n’avait pas été une simple guerre contre les démons. Elle avait été quelque chose de bien plus atroce. Un terrible secret. 

Ophélia se redressa. Elle était très calme, son esprit focalisé sur une analyse détaillée de la vérité. L’azoha avait vite comprit que pendant le transfert de données, Burrhus avait désactivé les programmes qui créaient en elle son humeur, ses émotions. Ces dernières auraient été irrémédiablement perturbées par ces révélations. Ainsi, Ophélia se sentit détachée. Pas indifférente, simplement dénuée d’émotions négatives comme positives. Face à l’horreur, seul son esprit logique réagissait.

Que se passerait-il lorsque l’azoha réactiverai son cœur ?

Ophélia soupira. Michaël faisait la sieste. El devait reposer le cristal dans sa chambre avant qu’el ne se rende compte de sa disparition. L’azoha rejoignit son enfant endormi. El rangea le cristal et observa Michaël, sa frêle silhouette sous le drap de soie, son doux visage, encore si enfantin. Dans son halo mauve de Fitzarch, des étincelles enflammées pétillaient, la trace visible de la présence de Phosphoros en el. Ophélia s’assied sur le bord du lit-œuf, atterrée. Ses émotions étaient désactivées, mais pas son amour, pas son besoin de protéger. 

À défaut de pouvoir ressentir, Ophélia analysa. Si elle l’avait pu, elle aurait été emportée par l’effroi, mais aussi par une colère sans précédent. Envers Raphaël, envers le Grand Architecte, envers Satanachia. Envers tous les élohim qui avaient implanté dans son enfant l’âme d’un meurtrier. 

Mon intrépide petit guerrier, ma courageuse vertu… Els se servent de ta vitalité pour ressusciter un monstre…

Je dois arrêter cela, décida Ophélia. Peu importait le prix à payer. Elle devait sauver son enfant, sauver la Création. 



Michaël, sur ordre de l’archange Raphaël el-même, resta confiné dans le gynécée royal. Trois semaines s’écoulèrent, que le jeune Fitzarch passa à faire les cent pas, entre ennui et frustration. Aucune nouvelle d’Ennead ne lui parvint.

— La situation est tendue à la cour, expliqua Ophélia à son fils. Ennead te garde ici le temps que la polémique autour de leurs récents déboires se tasse. 

— Je devrais être en train de préparer notre intervention à Guebourah à l’heure qu’il est, se plaignait Michaël, esquivant le sujet de la pénitence. Si je dois me racheter, qu’on me laisse prouver mon sérieux et mon implication ! 

Ophélia ne répondait pas. Elle restait calme, pensive, et faisait de son mieux pour distraire son fils. 

Malheureusement, il n’y avait pas grand-chose à faire pour un éloha adulte au gynécée. Seules les azohim du harem royal y étaient accueillies – épouses et mères de la dynastie Danielis, entourées de leurs jeunes enfants. L’endroit, baigné d’une douce lumière dorée, était composé d’une multitude de nids douillets et de salons coquets, où résonnaient constamment les cris, pleurs et babillements des enfants. Des draperies de soie beige couvraient les murs, des tapis moelleux protégeaient du sol en marbre poli. Des parfums de fleurs sucrées flottaient dans l’air.

Les azohim-mères, vêtues de robes fluides et élégantes, passaient la plupart de leur temps à s’occuper de leurs petits, leur chantant des berceuses anciennes, tandis que leurs jeunes, souvent agités et turbulents, jouaient bruyamment lorsqu’els n’étaient pas à l’école. Les azohim-tantes, comme Ophélia, plus âgées et imposantes, se déplaçaient avec l’assurance de celles qui avaient déjà tout vu, prodiguant des conseils et enseignant aux azohim-demoiselles leur futur rôle de mères et d’épouses. Ces dernières, de jeunes figures graciles aux regards curieux, s'affairaient à entretenir le gynécée : disposant des fleurs fraîches dans les vases de cristal, préparant des bains parfumés, ou assistant les mères. 

Tous les matins, des séraphins en chasuble pénétraient le sanctuaire pour mener un rituel de vénération au Porteur de Lumière, père des azohim. Leurs voix profondes, entremêlées de chants liturgiques, résonnaient dans l’immense salle de prière, s’élevant vers le dôme sacré où des symboles célestes s’animaient sous la lueur du rayon des âmes. Mais la dévotion des azohim s’arrêtait là. Pendant que leurs enfants jouaient, les mères et épouses se distrayaient lors d’ateliers de broderie, de confection de petits objets, ou de cuisine. Mais l’artisanat n’était pas leur intérêt. Elles passaient leur temps à discuter des affaires du royaume, ragotant à loisir. 

— Il parait que Daniel négocie âprement son aide avec le seigneur Satanachia de Guebourah. Je me demande quel pourcentage de notre population va être sacrifiée sur le front de l’Abysse cette fois. 

— Peu importe, ce ne sont pas nos enfants royaux qui y iront. C’est le peupl’aile. 

— L’Ecclésia a décidé que c’était le moment de se réveiller. Elle accuse les command’ailes vertus d’oisiveté et de conduite dissolue. 

— Les séraphins sont incapables de comprendre les valeurs progressistes de notre bien-aimé Sandalphon…

— Oui mais la situation devient critique. Les séraphins sont au bord de la révolte. Els manifestent dans le Sanctuaire. Les récents déboires d’Ennead semblent avoir fait déborder le vase de leur ressentiment…

— Daniel va devoir leur faire quelques concessions…

Michaël écoutait ces discussions avec attention, tentant de grappiller des informations sur Ennead. 

— Els ne veulent pas te garder chez eux, expliquèrent les azohim. Tu semble avoir fait une assez grosse bêtise pour ne plus être le bienvenu. Tes actions ont porté sur els des soupçons d’hérésie. 

— Ça n’a aucun sens ! s’indignait Michaël. Montseron fait juste ça pour gagner du pouvoir c’est tout !

Le jeune Fitzarch ne pouvait même pas se connecter au réseau EL pour contacter sa chorale, ou se distraire. Ce dernier était bloqué dans le gynécée, les cristaux formellement interdits. Du moins… normalement. 

Seul dans sa chambre, Michaël passait ses soirées à scruter le petit cristal que lui avait confié le chérubin Nakirée sur Sicad. El se souvint des paroles de ce dernier. Il lui fallait donner ce cristal à un certain Euthanatos. Michaël s’était subtilement renseigné. Ce dernier était un chérubin du lointain royaume de Chokmah. Comment diable Michaël pourrait le rencontrer ? L’idée de confier le petit objet à quelqu’un le répugna. Nakirée avait mentionné que l’objet ne devait en aucun cas tomber dans les mains de qui que ce soit d’autre. 

— Il faut que j’en parle à Raphaël…

Michaël tenta d’utiliser le cristal pour se connecter au réseau EL, en vain. Cet appareil ne ressemblait pas vraiment aux boules de cristal des élohim. Il était sombre, opaque. Dans sa matière sombre, Michaël cru distinguer des étincelles mauves. Était-ce la trace du command’aile angélique qui possédait jusqu’à récemment l’objet ? Les anges, comme tous les descendants du Grand Architecte, avaient un halo mauve. 

Ce cristal doit contenir des secrets sur ce qu’il s’est réellement passé à Sicad, cru comprendre Michaël. Je découvrirai la vérité. Je rendrai justice aux gardiens. 



Un soir, alors qu’el contemplait le cristal, on vint frapper à la porte de Michaël. Le jeune Fitzarch eut à peine le temps de réagir, deux gros séraphins entrèrent.

— Veuillez-vous suivre, ordonnèrent-els sèchement.

— Quoi ? Où ça ?!

— À la cathédrale. 

— Non ! Pourquoi ?! 

Les séraphins, gros et forts, attrapèrent Michaël par les bras. 

— Je dois parler à l’archange Raphaël ! clama la jeune vertu. C’est urgent !

Les séraphins n’écoutèrent pas Michaël. Leurs regards enflammés étaient durs, leurs mines déterminées. Els trainèrent violemment le Fitzarch hors de sa chambre. Ce dernier chercha sa mère du regard, sans succès. El se rendit alors compte que des centaines de séraphins avaient envahi le gynécée. Leurs halos brûlaient vivement sous la colère. Les enfants pleuraient. Les azohim les éloignaient, effrayées. Très vite, Michaël fut extrait du gynécée. La lumière de l’extérieur l’aveugla. 

— Lâchez-moi ! Je suis un Fitzarch ! Michaël Fitzarch ! Lâchez-moi, misérables !

Le jeune Fitzarch eut beau se débattre, les gros séraphins le tinrent fermement et l’entrainèrent sur un pont de cristal, qui reliait la tour du gynécée à la tour principale du Sanctuaire. Michaël baissa les yeux sur le sol translucide et vit à travers des millions d’élohim voler dans tous les sens. 

Soudain, des trompettes familières retentirent et la ruche s’écarta. Une lumière d’ambre et d’argent inonda l’univers. C’est là qu’el le vit.

— Raphaël ! appela Michaël.

Volant à toute vitesse, le prince de Hod remontait du centre-ville, accompagné par une cohorte de ses courtiers. À travers le réseau EL, Michaël projeta toute sa lumière vers lui et sentit son halo se connecter au sien. Mais le lien se coupa immédiatement. L’archange majestueux fila vers le ciel comme une étoile en criant :

— Épouse-mooooiiiiii !

Dans les hauteurs du Sanctuaire, sa lumière archangélique baigna l’atmosphère. Michaël scruta son mentor tant bien que mal, continuant de l’appeler. El semblait avoir fait halte ! Peut-être qu’el était prêt à l’écouter. Michaël connecta de nouveau son esprit au réseau et à travers les yeux d’un ophana, el obtint une meilleure vue. Raphaël flottait bel et bien dans les airs. El était comme neuf, déjà guérit de la brûlure de Nukvah ! C’était un miracle ! Ennead avait de très bonnes vertus-médecins, mais là, c’était du jamais vu ! Michaël vit que son mentor tenait une azoha dans ses bras, couvrant ses épaules et son cou de baisers.

— Épouse-moi, répétait-el à l’envi, épouse-moi, épouse-moi.

Plus qu’embarrassée, la sublime azoha ne pouvait que bégayer.

— Mais…mais…je suis venue ici pour épouser un autre…

Le visage de Michaël se décomposa. Son espoir le quitta.

— Non mais je rêve, murmura-t-el.

Derrière el, les séraphins-prêtres soupirèrent. Lassés bien vite par ce spectacle, els l’entraînèrent de plus belle vers la tour centrale.

— Attendez !

Atterrissant sur le pont, Kokabiel, petit frère de Raphaël, barra soudain la route au cortège.

— Kokabiel ! s’exclama Michaël. Oh par EL ! Aide-moi ! Il faut que je voie Raphaël ! 

Kokabiel croisa les bras, la mine assombrie. 

— Es-tu prêt à lui présenter tes excuses ? demanda-t-el. 

— Quoi ?! Non... non… Il…il faut que je lui parle de… quelque chose d’important… haleta Michaël, emporté par l’urgence. C’est à propos de Sicad ! Quelqu’un a saboté Sicad !

— Tss, siffla Kokabiel. Tu persiste dans ton péché. Raphaël s’y attendait et n’a pas envie de t’entendre pour l’instant.

— Peu importe mon péché ! Il faut que je lui parle !

— Tu nous as apporté suffisamment de problèmes Michaël. À cause de toi, l’œil de l’Ecclésia est sur nous. Tu dois expier tes fautes. Sinon c’est tout Ennead qui paiera pour toi. 

Sur ce, Kokabiel décolla rejoindre son archange de frère. Michaël l’appela, en vain. Les séraphins le trainèrent jusqu’à la tour centrale et arrivèrent dans un grand hangar où étaient parqués des milliers de véhicules volants. Là, des puissances de l’Ecclésia, toujours en armure blanche, rejoignirent les séraphins. Le cortège monta dans une large navette. Alors qu’on le forçait à l’arrière du véhicule, Michaël continua de protester, en vain. En guise de réponse, les puissances déployèrent sur Michaël une thaumaturgie de restreinte, suffisamment puissante pour paralyser un éloha de deuxième génération.

Privé de ses ailes, de ses membres et de son accès au réseau EL, le jeune Fitzarch ne put échapper à ses ravisseurs. Son esprit fut noyé sous la panique et sous la lumière des halos de millions d’élohim, qui pour certains, le regardaient descendre vers Kokab d’un œil intrigué. Au bout d’un trajet interminable, le petit convoi arriva dans l’immense cathédrale. Cette fois, dans le parking attribué, assez grand pour être considéré comme un célestoport à part entière. Michaël ne fut pas non plus emmené dans la nef. On l’entraîna dans des couloirs sans fin, qui se rétrécirent petit à petit, jusqu’à aboutir dans une pièce circulaire, sûrement nichée dans une des tours latérales de la cathédrale. On jeta Michaël là-dedans, toujours restreint. Le jeune prince n’eut pas le temps de se débattre que déjà, des vertus-ecclésiales vinrent l’embêter. Els le déshabillèrent de force pour lui faire revêtir la tunique noire des pénitents. Puis on le laissa seul quelques instants.

— Rha !

Immédiatement, Michaël invoqua sa thaumaturgie pour se défaire des sorts de contrition. Bien que puissants, els étaient basiques et les quelques nœuds supplémentaires tissés dedans ne lui résistèrent pas. Prends ça fichu nobl’aile qui a tissé ce truc ! Je suis un Fitzarch ! Rien ne peut me contraindre ! Libéré, Michaël bondit vers la porte, laissée déverrouillée et déploya ses ailes pour monter dans le puits de la tour. En haut, el aperçut de nombreux halos de fer. Une centaine de puissances montaient la garde au sommet. Avant qu’el ne puisse se préparer, les gardes repérèrent Michaël, qui n’eut d’autre choix que de redescendre à toute vitesse.

BAM !

Michaël percuta violemment le sol, laissant un petit cratère à ses pieds. Son atterrissage avait été calculé. El se releva donc en un clin d’œil, prêt à déguerpir. Mais PAF. Michaël s'écrasa contre un grand obstacle et s'effondra. Assommé, el battit des paupières, luttant pour se relever. Devant el se dressait un grand éloha. Ce dernier se pencha en avant. Michaël cria alors que le géant le saisit tout entier d'une seule main et le secoua comme une poupée désarticulée. Le colosse le disséqua d’un regard d’or meurtrier.

— Arg…

Michaël, compressé, retint un haut de cœur. C’était encore un séraphin qui l’avait attrapé, mais celui-là était d’une autre carrure. El faisait au moins trois fois la taille de la jeune vertu, ses trois paires d’ailes déployées en grand lui donnaient une envergure vertigineuse. El portait une grande chasuble de prêtre, par-dessus laquelle des yeux de lumière dorée pulsaient par dizaines. Son halo de flammes engloutit Michaël. Ce feu était aussi grand qu’ancien. Il rivalisait avec les lumières de Raphaël, des Fitzarch et de tous les nobl’ailes que Michaël connaissait. Alors qu’el reposait le petit prince au sol, l’antique séraphin grommela. El ne cessa de le sonder de ses iris d’or liquide, remplis de fureur. Michaël ne flancha pas. El plongea son regard défiant dans le regard du géant, et y lu son nom.

— Burrhus ?

— Votre altesse céleste, salua-t-el en retour.

Une douche froide s'abattit sur Michaël. 

— C’est vous Burrhus ! Burrhus de Sicad !

— Oh, vous me reconnaissez. Je suis flatté. 

Le séraphin observa la toute petite vertu. Cette dernière tenta d’éviter le piège qu’el devinait. 

—  Que faites-vous ici ? 

— Suite au préjudice que vous avez porté à Sicad et à Ennead, l’archange-prince Raphaël m’a nommé Guide de votre Pénitence. 

— Qu…quoi ?

Brusquement, Burrhus saisit de nouveau Michaël d’une seule main, un sourire sadique aux lèvres. L’univers se mit à tourner pour la jeune vertu, emporté à toute vitesse. En quelques battements d’ailes, Burrhus le mena au Transept du Jugement pour le jeter dans la fosse noire. La litanie des pénitents reprit, emportant Michaël dans une douleur atroce.

— Encore ?! Pourquoi ? Pourquoi ? Vous voulez me faire taire c’est ça ?

— Vous faire taire ? ria Burrhus. À propos de quoi ?

— Le commandant Nakirée m’a dit que vous aviez saboté l’évacuation de Sicad !

Burrhus prit un air pensif.

— Pourquoi diable aurais-je fait une telle chose ? Sicad était mon domaine, mon précieux lieu de culte. Avez-vous des preuves de ce que vous avancez ? gronda-t-el. 

Michaël battit des paupières, réfléchit. El avait le cristal de Nakirée, qui contenait vraisemblablement des preuves. Mais el n’avait pu exploiter le contenu caché dans ce cristal. Peu importait. Burrhus ne devait pas savoir. Le grand séraphin interpréta le silence de la petite vertu en souriant.

— Vous ne rapportez que les élucubrations d’un chérubin jaloux, condamné par sa propre incompétence. Ne vous tourmentez plus à propos de Sicad. Concentrez-vous plutôt sur votre pénitence. 

Le regard de Michaël se remplit encore plus d’effroi. Burrhus sourit encore, comme un prédateur face à sa proie.

— L’issue à votre tourment se trouve en vous Michaël. Ne désespérez pas. Collaborez et priez pour la Miséricorde.

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